vendredi 18 mars 2016

Psychologie et comportement du cheval - Danièle Gossin

C'est la 6ème édition (revue et complétée) du livre que j'ai lu. Un peu de temps pour trouver la date de la 1ère parution : il semble que ce soit 1982 !
Alors vous pouvez maintenant trouver beaucoup de livres sur ce sujet, certains plus complets et actuels, mais celui-ci a joué un rôle pionnier.

Et il reste intéressant sur beaucoup de points. Je me souvenais des expériences d'apprentissage du vocabulaire avec une jument, je ne retrouvais plus la source, et bien BAM :
C'est Danièle qui en a réalisé avec sa jument Dalame. Elle a pendant 15 ans mené cette étude, au terme de laquelle Dalame avait assimilé 182 mots différents, et surtout saisissait également les combinaisons de mots et les phrases composées de ces mots. (Volte, 1/2 volte, épaule en dedans, huit de chiffre, galop à gauche, reste là-bas, rentre à la maison, les chiffres de 1 à 5 puis 6 et 8, piste intérieure, arrête de... , Bravo << par exemple !)


Le livre présente des études de chevaux dans le travail et en liberté. 
Étude comparée des fonctions et aptitudes, Intelligence, Psychologie et applications pratiques. 

On y retrouve aussi des anecdotes personnelles de l'auteur qui illustrent les différents sujets.
Très intéressante lecture donc !

Extraits choisis :

"Le cheval n'a jamais dit un "OUI" définitif à l'homme, mais un "OUI, à condition que...". Il garde sa marge de liberté, et de révolte si besoin est. C'est peut-être ce qui fait toute sa noblesse et tout son attrait. Si l'on trahit sa confiance, on la perd définitivement la plupart du temps. Parfois ce n'est, comme nous le disions, que maladresse, ou méconnaissance de cet animal. C'est pourquoi il est important de comprendre comment il "fonctionne" physiquement et psychologiquement avant de savoir à quoi sert une jambe isolée ou un cinquième effet de rêne.
Trop de cavaliers venus à l'équitation pour le cheval lui-même et pour le mieux connaître s'en repartent très vite, déçus ; trop de chevaux bien constitués, qui auraient pu être excellents, vont grossir la masse de gâchis qu’entraîne l'ignorance de leur psychisme et les erreurs indélébiles qu'elle entraîne. Il serait par conséquent indispensable que les enseignements prennent sérieusement en compte la psychologie du cheval dès les premières leçons, ce à quoi ne les incitent pas des manuels et examens d'équitation qui continuent de considérer l'animal comme une machine dont il suffit de bine connaître les boutons. Il serait temps de s'apercevoir que c'est un peu plus compliqué et plus passionnant que cela, et qu'il est pour le moins illogique que ce qui constitue la grande originalité de l'équitation comparée aux autres sports, à savoir la nécessité de s'entendre avec un être vivant d'une autre espèce, soit officiellement passé sous silence."
Avant-propos
"Psychologiquement non seulement il ne faut pas faire d'erreurs – car avec l'animal cela pardonne rarement – mais il faut savoir où l'on veut aller et pourquoi on fait choix de tel moyen plutôt que de tel autre, qui semblerait parfois plus direct et d'un effet plus immédiat. Et de deux procédés également efficaces physiquement, l'un peut être psychologiquement à éviter absolument avec tel cheval à tel moment. Le cavalier doit monter surtout avec sa tête, et jamais avec ses impulsions, notamment en compétition où l'excitation du moment risque de lui faire oublier que le cheval n'a pas laissé son psychisme au paddock, et que la moindre erreur se paie tôt ou tard."
Le poids réel de la psychologie
"Dans la nature ou au pâturage, les chevaux vivent en groupe hiérarchisé. Cependant, ils ne se tiennent pas à proximité les uns des autres comme les moutons en troupeau, gardant – sauf exceptions que nous indiquerons plus bas – une distance minimum de plusieurs mètres entre eux. On dira donc que les chevaux sont des animaux grégaires mais non proxémistes. […] du reste, dans un espace suffisant (>14m x N chevaux), chaque cheval évite de pénétrer par inadvertance dans la bulle d'un autre, excepté en cas d'agression volontaire, et chaque animal a tendance à s'écarter toute naturellement lorsqu'un autre membre du groupe risque d'effleurer involontairement sa bulle. Cela évite aux membres d'un groupe animal de s'épuiser à d'inutiles conflits.
Lorsqu'on s'approche du box d'un cheval et y pénètre, on franchit successivement la distance personnelle, la distance critique et la distance d'attaque (celle où, même dominé et vaincu d'avance, tout animal sauvage acculé fonce sur l'intrus et l'agresseur). Habitué à l'homme dès sa naissance, et si celui-ci s'y prend bien, le cheval peut l'adopter comme compagnon, voire comme compagnon préférentiel, donc accepter sa proximité, et même la souhaiter."
Etude des fonctions
"L'univers du cheval est si peu varié, les conditions de sa domestication, sont telles, il est à ce point privé de jouets (source d'imagination et de créativité), de contacts avec des réalités multiples et avec le langage humain qu'il a bien du mérite à n'être pas aussi idiot qu'il devrait normalement le demeurer !
Plus vous lui consacrerez de temps en dehors du travail et plus vous le verrez s'éveiller et vous étonner par des comportements de plus en plus pensés et élaborés. Par contre, l'inaction est à la fois une cause d'oxygénation insuffisante, d'un manque d'exercice de la mémoire et de l'attention qui, comme nous l'avons vu, sont des éléments indispensables au développement de l'intelligence."
"Après une quinzaine d'années d'observations en ce domaine, je peux dire que les chevaux dont on punit les fautes, fût-ce avec modération, alors qu'on ne récompense jamais les actions correctes ne sont pas très obéissants ; on en trouve même qui, comme certains enfants, désobéissent pour qu'on s'occupe d'eux puisque seule la désobéissance suscite une réaction de la part de l'utilisateur. Par contre, un enfant ou un animal dont on valorise l'attention, la compréhension, l'obéissance et la bonne exécution cherchent à renouveler les occasions de récompenses et de plaisir en étant attentifs, dociles et appliqués.
Aussi (mis à part la gaule de dressage qui sert d'indication par attouchements, qui ne punit jamais et que le cheval ne craint absolument pas), je n'utilise ni cravache ni chambrière ; mais j'ai toujours des éloges, des récompenses et des caresses de réserve ; de cela le cheval ne se blasé jamais ; mieux : il en a besoin, au point qu'il cherche sans cesse à comprende, à s'appliquer, à réussir pour les obtenir."
"En bref, vous voulez un cheval obéissant ; soyez simplement ferme, sachant ce que vous voulez, dans les plus petits détails de ce qui est nettement à sa portée ; mais, surtout, récompensez-le dans toutes les circonstances suivantes :
  • attention
  • application (même si la réussite n'est pas encore parfaite ; il suffit alors de récompenser un peu moins que si elle l'était)
  • compréhension
  • progrès, même infime
  • réussite
  • effort
  • initiative heureuse.
Evidemment, plus le sujet est indocile, inattntif, rétif au départ, plus il faut le récompenser quand, simplement, son défaut n'apparaît pas. […]
l'absence de récompense est en elle-même une sanction dès que l'on sort de l’extrême facilité. Le cheval n'est pas contrariant de nature, il le devient par la maladresse, l'ignorance, l'absence de psychologie ou de pédagogie de l'utilisateur. Il faut alors changer sa façon de voir les choses en adoptant une attitude plus amicale et astucieuse, tout en restant le meneur de jeu."
"Le rétif est un cheval qui fait des défenses. Il faut donc lui prouver qu'on ne l'attaque pas, ce qui va lui occasionner une grande surprise ; profitons-en pour lui demander quelque chose de très simple qu'il va exécuter machinalement ; tout aussitôt nous allons le récompenser d'une caresse douce et d'une flatterie dont un passé d'affrontements lui avait fait oublier l'existence. Contre quoi se défendrait-il alors qu'on ne le comprime ni dans la main ni dans les jambes, qu'on ne lui demande qu'un travail simple et peu prolongé, se contentant de lui faire tranquillement refaire un mouvement un peu moins précis, le récompensant d'avoir mieux réussi ou simplement d'avoir donné satisfaction ? Il va rentrer à l'écurie sur une bonne impression, ayant compris que l'homme n'est pas forcément un ennemi et qu'il y a plus d'agrément à collaborer qu'à être en conflit avec lui."
"Rappelons que les relations entre chevaux sont de deux types : la relation hiérarchique dominant-dominé et la relation de compagnonnage sélectif. Si le premier type de relation s'instaure entre le cheval et le cavalier, ce dernier peut être dominant ou dominé. Celui qui est dominé n'obtient pas grand-chose et prend des risques. Celui qui veut dominer obtient une obéissance contrainte, qui se maintient par une certaine peur préjudiciable au climat de confiance que nécessitent la compréhension et la bonne volonté de l'animal. La domination est un modèle certes naturel mais il est illusoire de croire qu'il s'applique parfaitement au travail car, dans la nature, le dominé ne partage aucune activité avec le dominant, se tenant au contraire à distance de celui-ci.
Rousselet calquait son pacte sur celui, tout aussi naturel mais plus approprié, qui unit à vie deux chevaux amis. Ceux-ci broutent côte à côte, se toilettent et se chassent mutuellement les mouches (position tête-bêche, queue balayant le corps du congénère), jouent ensemble, se protègent parfois mutuellement des agresseurs. Ils ont constamment le souci de ne pas contrarier l'autre ; la hiérarchie est inutile et abolie entre eux : ils on confiance en eux-mêmes et en l'autre et ont spontannément une respectueuse affection l'un pour l'autre."
Psychologie et pédagogie
"Voilà pourquoi, avec les poulains très craintifs, on a tout intéret à utiliser ce qu'on nomme le "maître d'école", qui n'autre qu'un cheval confirmé sur lequel le poulain ne tardera pas à aligner sa conduite, ce qui amènera la confiance et l'amélioration de la qualité du travail. Car la nervosité comme la décontraction sont infiniment communicatives. Le jeune cheval doit faire connaissance avec tous les objets de son environnement dont les couleurs et les formes ot tô fait de l'affoler ; mais lorsqu'il verra son aîné passer à côté d'eux sans manifester la moindre réaction, il se rassurera.
Quand aux exercices, il lui sera plus facile au début de les copier que de les comprendre. On les fera donc exécuter par le "maître d'école" en les lui demandant."
"L'homme garde aussi pour le cheval une part d'inconnu. Non seulement il fait partie des espèces prédatrices, mais son comportement, mû par d'obscures raisons aux yeux de l'animal, est d'une trop grande variété pour ne pas l'inquiéter.
Etant complexe, il ne lui paraît pas toujours logique. Et il y a trop de calcul et pas assez d'innocence chez l'homme pour que l'animal, quel qu'il soit, ne conserve pas une certaine méfiance à son égard. D'instinct, le cheval se méfie moins des enfants qui sont plus proches de lui par leur spontanéité et la logique simple de leur attitude ; il les craint moins, et se montre même tolérant, presque protecteur à leur endroit."
Caractères d'espèce
"Mis à part quelques sujets héréditairement caractériels, ou victimes de mauvais traitements, d'un débourrage hâtif, de maladresses, d'imprudences, le cheval se montre, avec l'homme, davantage un émotif qu'un agressif. Et, s'il faut se montrer ferme dans les premières minutes avec un dominant qui "tâte le terrain", c'est la douceur patiente mais sans faiblesse qui convient le mieux et assure la meilleure sécurité avec cet animal sensible, que la peur pourrait éventuellement amener à se défendre préventivement.
Non seulement sa peur, mais la vôtre, qui modifie l'odeur de cotre transpiration, l'électromagnétisme de votre peau, la tension de vos muscles. Autant de messages d'alerte qu'l perçoit à distance. Tout comme le chien mordeur qui épargne dix passants indifférents, et se jette sur le onzième qui le craint. J'ai côtoyé un certain nombre d'animaux agressifs ; et s'ils m'ont épargnée, c'est parce que j'ai la chance de réagir spontanément à l'agression par un brusque et total relâchement, un abandon qui déroute l'agresseur. Devenue chose inerte, privée de sensations et de tout sentiment sauf l'amitié, je ne me sens pas concernée.
Le corps produit alors des inhibiteurs perçus par le corps de l'animal qui en produit à son tour (phénomène de résonance biochimique à faiche distance, précédé d'un processus olfactif à champ plus étendu). La douceur de la voix peut également jouer un rôle."
Il est utile d'aborder n'importe quel cheval inconnu en ami relaxé et confiant, et ce peut-être une question d'entraînement préalable."

Caractère individuel

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire